Au moment où les lecteurs français découvrent Parade, le nouveau roman de Yoshida Shûichi, les Japonais verront, à compter du 20 février, dans les salles obscures son adaptation cinématographique signée Yukisada Isao. Difficile de dire si le film qui en est tiré sera à la hauteur du roman, mais, comme il est malheureusement peu probable qu’un distributeur français prenne le risque de le sortir, vous avez donc tout intérêt à vous précipiter chez votre libraire pour vous procurer ce petit bijou. Après Park Life déjà publié chez Philippe Picquier, Yoshida nous offre une nouvelle tranche de vie telle qu’elle est vécue dans cette mégalopole qu’est Tokyo. Bien sûr, les personnages choisis par le romancier ne sont pas tout à fait ordinaires même si, d’une certaine façon, ils représentent toutes les facettes de la société japonaise. Entre l’étudiant qui “est monté à Tokyo, mort d’angoisse”, la jeune fille sans profession qui “a découvert qu’elle n’avait d’intérêt pour rien” ou encore le salarié qui, en dépit de son intégration sociale (il a un boulot et un salaire convenables), s’illustre par des accès de violence incontrôlable, Yoshida brosse un tableau fort intéressant de la société contemporaine japonaise. Au-delà même de la personnalité des uns et des autres, ce sont les rapports qu’ils entretiennent entre eux qui piquent notre curiosité. En effet, les cinq protagonistes de l’histoire vivent sous le même toit alors qu’a priori rien ne les prédestinait à le faire. Au travers du regard de chacun d’entre eux, on découvre la complexité de leurs relations. “Même si nous vivons ensemble depuis des mois, pour moi, au fond, Koto n’est qu’une amie parmi d’autres. En fait, c’est compliqué, ce sentiment de distance”, explique l’un d’entre eux. Mais il s’en accommode comme les autres d’ailleurs. Chacun s’adapte. Yoshida ne se pose pas en donneur de leçons, il constate et il accorde au lecteur le soin de porter son propre jugement sur le comportement des différents personnages. Il le fait de façon simple, mais avec force.
C. L.
Parade, de Yoshida Shûichi, trad. de Gérard Siary et Mieko Nakajima-Siary, éd. Philippe Picquier, Arles, 19,50€.