Nobi nobi , c’est être à son aise, évoluer sans souci, dégagé de toute contrainte. Plutôt rare, me diriez-vous, en décembre où les Japonais auraient davantage tendance à se la jouer speed avant de se plonger dans la torpeur des congés du nouvel an. Dans les grandes villes, l’arrivée de l’hiver me donnait toujours plus ou moins l’impression que chacun cherchait à finir l’année en beauté, en courant à droite à gauche avec l’idée que de toute façon on pourra toujours se reposer en janvier. Mais voilà qu’à la campagne, tout pourrait bien être différent. On m’avait prévenu : “Okayama ? ii ne. Nobi nobi dekiru yo!” (Okayama ? C’est bien. Tu vas pouvoir prendre tes aises !). C’est vrai que la concentration urbaine de Tokyo ou d’Osaka fait qu’on est pas mal les uns sur les autres et qu’à côté Okayama peut faire mine de gentil village, mais de là à m’imaginer pouvoir me la couler douce dans une ville qui est quand même le chef-lieu du département du même nom et où passe la ligne Sanyô du Shinkansen (prolongée à l’est d’Osaka par la fameuse ligne Tôkaidô), j’attendais de voir. Jusqu’ici, tout me paraît si tranquille, si paisible, presque impassible, que je vois mal les gens basculer subitement dans le stress de journées trop remplies, cédant à la pression, aux contraintes et à l’idée que ça y est, c’est parti pour le grand rush annuel. Non. Décidément, je me vois plutôt la descendre en vélo, moi, la fin d’année. En roue libre, la chaîne bien calée sur le petit pignon s’il vous plaît. Pas de relâche, juste un bon coup de détente.
Pierre Ferragut