Des premières comédies et des mélodrames réalisés entre 1930 et 1934 à la Cie Shochiku (Après notre séparation/ Kimi to wakarete, Bon courage, larbin/ Koshiben gambare) aux superbes mélodrames familiaux, parfois proches d’Ozu, des années cinquante (Le Repas/ Meshi; La mère/ Okasan, montré à l’époque en France; Le Grondement de la montagne/ Yama no oto, d’après Kawabata; Nuages flottants/ Ukigumo, sorti il y a quelques années ici, et tant d’autres), jusqu’aux derniers feux des années soixante (Quand une femme monte l’escalier/ Onna ga kaidan o agaru toki, 1960), le cinéma de Naruse révèle dans sa majorité une vision pessimiste de la vie du couple, de la famille, et de l’histoire sociale du Japon. Représentant majeur du cinéma “shomin geki” (drame populaire), Naruse atteint, par touches patientes et grises, au sublime dans le désespoir, comme dans l’un de ses chefs d’oeuvre méconnus, Au gré du courant (Nagareru, 1956), récit implacable du déclin d’une maison de geisha. On notera surtout la constance de sa collaboration avec celle qu’on peut appeler son “actrice-fétiche”, la grande Takamine Hideko, qui tourna dans la plupart de ses films, de l’époque de Hideko, receveuse d’autobus (Hideko no shasho-san, 1941) à Délit de fuite (Hikinige, 1967), son dernier film. Ce fut aussi Takamine qui incarna les héroïnes indépendantes et parfois révoltées de ses nombreuses adaptations des œuvres de la femme écrivain Hayashi Fumiko (Le Repas; L’éclair/ Inazuma; Nuages flottants/ Ukigumo; Chronique de mon vagabondage/ Horoki, entre autres films imprégnés de l’atmosphère douce-amère de l’auteur). En tout, 37 films sont programmés, sur les 87 que Naruse a tournés, et dont la plupart sont perdus aujourd’hui. Comme d’habitude, la Cinémathèque Française ne programme les films que deux fois, ce qui ne permet certes pas de tout voir, mais c’est mieux que la séance unique qui a longtemps prévalu. En revanche, le programme est affublé d’un texte de présentation de Naruse d’un verbiage pompeux et inutile, qui n’apprend rien ni sur le cinéaste, ni sur le cinéma de son temps. On se reportera plutôt aux quelques ouvrages qui traitent vraiment de l’œuvre de Naruse, notamment le catalogue du festival de Locarno 1983, textes et filmographie intégrale commentée par Audie E.Bock, et celui, bilingue (espagnol/ anglais) de San Sebastian, sous la direction de Hasumi Shigehiko, ainsi que les chapitres voués au cinéaste dans les divers ouvrages, en français, en anglais, ou en japonais, consacrés à l’histoire du cinéma japonais. Sore ja, mata! |
Quand une femme monte l’escalier |