En ces temps de mondialisation, on ne s’étonne plus de trouver des fraises ou des cerises en hiver. On ne s’étonne plus également de découvrir dans les rayons de nos supermarchés des vins venus du Chili, des Etats-Unis ou d’Australie. La bière chinoise et la bière japonaise commencent à tailler des croupières aux autres bières étrangères. Kirin ou Asahi, les deux marques les mieux implantées sur le territoire français, sont encore loin de devenir les rivales de Heineken ou Kronembourg, mais leur nom évoque quelque chose à tous ces Français — et ils sont nombreux — qui fréquentent régulièrement des restaurants japonais ou “pseudo” japonais (c’est-à-dire tous les restaurants chinois transformés par opportunisme commercial en établissements spécialisés en sushi et yakitori). Il se peut que dans quelques années, une autre marque devienne une référence. Il s’agit d’Owa Beer, une bière japonaise créée et brassée en Belgique par Imai Leô, un ancien de chez Kirin, qui voulait produire une bière de caractère, spécialement adaptée à la cuisine japonaise. “J’avais envie d’une bière qui ne soit pas trop légère et qui puisse s’apprécier avec des plats japonais”, raconte-t-il. L’un de ses secrets de fabrication est la présence de thé qui renforce l’amertume de ce breuvage quand il pénètre dans le palais avant de le rendre plus doux.
Quand il parle de sa bière, M. Imai se montre très sérieux. Derrière son visage encore juvénile, on perçoit la volonté d’un homme plein de conviction. “Bien sûr que je veux réussir et vendre beaucoup de ma production. Mais je veux qu’elle soit mise en valeur dans des établissements qui pratiquent une cuisine japonaise authentique. C’est la seule façon de pouvoir pleinement l’apprécier”, explique-t-il. Implanté en Belgique où il a dû rivaliser d’efforts pour se lancer dans ce pays où la bière est la boisson nationale, M. Imai commercialise sa bière dans une bonne trentaine de restaurants. Il a commencé aussi à se tourner vers de nouveaux marchés comme l’Allemagne ou l’Angleterre où l’accueil a été très bon. Fort de ce succès, il s’attaque désormais à la France, mais toujours avec la même exigence.
C’est pourquoi, on ne trouve sa bière pour le moment que dans des établissements parmi les plus cotés de la capitale comme Aïda et Shu. L’épicerie Kioko en vend aussi au détail. “Une bonne bière mérite une bonne cuisine”, ajoute le brasseur toujours plein de sérieux. S’il est autant attaché à marier bonne chère et bonne bière, c’est que M. Imai a l’ambition d’ouvrir dans les années à venir son propre restaurant de cuisine japonaise où il pourra faire déguster sa bière déjà récompensée en 2008 par l’Institut international du goût et de la qualité qui lui a décerné un Superior Taste Award 3 étoiles. En attendant de réaliser ce rêve, notre brasseur va augmenter sa production et continuer à tisser des liens entre l’Europe et le Japon comme le nom de sa bière le dit si bien. Owa signifie littéralement Europe-Japon. Une jolie appellation qui en dit long sur les ambitions de M. Imai.
Odaira Namihei