Au Japon, on ne mange pas qu’avec des baguettes. Fourchettes, couteaux, cuillères, rien de tout ça n’est absent des tiroirs des cuisines. Pourtant, quand on achète un bentô pour son déjeuner, ces fameux plateaux-repas aussi copieux que variés, la question de savoir avec quoi on va le manger ne se pose pas. Quand elles ne sont pas accolées directement au produit, les baguettes sont systématiquement proposées, voire imposées, à la caisse par le vendeur. Idem dans la majorité des restaurants et bistrots de l’Archipel qui s’épargnent ainsi une quantité non négligeable de vaisselle. Il s’agit de baguettes jetables en bois renfermées dans un étui en papier ou en plastique et généralement accompagnées d’un cure-dents également en bois. De quoi entretenir une polémique vieille maintenant de plusieurs décennies selon laquelle ces baguettes sont un désastre écologique. Car qui dit consommation quotidienne de baguettes en bois jetables dit déforestation intensive avec tous les problèmes environnementaux que cela induit. Près de 90 % de la production de ces baguettes (plus de 20 milliards de paires par an) proviennent de Chine où très rares sont ceux qui pratiquent le boisement pour renouveler les forêts. Certains soulignent cependant que le marché de ces baguettes jetables fait vivre à lui seul des populations entières de Chinois, sans se demander, sans doute, quelles pourraient être les solutions de rechange pour entretenir l’activité économique des régions concernées. Et des millions de Japonais continuent chaque jour à faire craquer leur baguettes en les séparant : paki (パキ). Pierre Ferragut |