Les fans du très provocateur et prolifique Miike Takashi, auteur d’une trentaine de films en dix ans, peuvent se réjouir. Un des films les plus délirants de l’auteur-culte, qui n’est pourtant pas en reste, Gozu, leur est proposé dès le…14 juillet. Présenté en 2003 à la Quinzaine des Réalisateurs de Cannes, ce film, pur produit de l’imagination plus que fertile de l’auteur très controversé de Audition, Visitor Q, ou Dead or Alive 1,2,3, est une nouvelle variation déjantée sur le milieu des yakuza vu par Miike. Il conte le destin improbable mais fascinant de deux yakuza, Minami (Sone Hideki) et Ozaki (le fidèle Aikawa Shô), liés à la vie et à la mort. Ce dernier, frappé de paranoïa, s’en prend à un chien soupçonné d’appartenir à un gang rival, (sic) et doit échapper à son ex-ami (qui lui a sauvé la vie autrefois), chargé par un oyabun de l’exécuter. S’ensuit une partie de cache-cache bizarroïde aux environs de Nagoya, où tout peut arriver…et tout arrive, jusqu’à un finale où le terme “renaissance” prend tout son sens…
Pour tous ceux que la trilogie Dead or Alive avait passablement fatigué, Gozu (nom propre, mais aussi animal légendaire lié au shintoïsme) apportera une certaine jubilation engendrée par la liberté absolue que prend Miike avec le récit et les codes, pas toujours de façon très ragoûtante. Bon appétit ! Rappelons que Miike a tourné encore trois films depuis Gozu !
Cependant, si vous êtes fortement indisposé par le cinéma trash de Miike (ce qui peut tout de même arriver), signalons la réédition le 24 juillet d’un film assez rare de Kurosawa Akira (mais sorti récemment en DVD chez Wild Side Vidéo), Entre le ciel et l’enfer (Tengoku to jigoku), histoire de kidnapping et de rédemption morale adaptée en 1963 d’un polar d’EdMcBain. Ne pas manquer la fin, où l’inspecteur Nakadai Tatsuya descend dans les bas-fonds du Yokohama de l’époque. Hallucinant.
On annonce surtout la sortie en salles (enfin!) d’un des chefs-d’œuvre de Masumura Yasuzô (déjà passé sur la chaîne thématique Ciné-Classic l’an dernier avec trois autres films de l’auteur de L’Ange rouge), La Femme de Seisaku (Seisaku no tsuma, 1965), film en noir et blanc somptueux, d’une force impressionnante, avec la superbe Wakao Ayako, au zénith de sa période Daiei. Il s’agit en fait du remake d’un classique du muet, adapté en 1924 par Murata Minoru d’un roman de Yoshida Genjirô. Histoire d’un amour fou entre une (trop) belle paysanne et un jeune homme-modèle (Tamura Takahiro), à la veille de la guerre russo-japonaise, La Femme de Seisaku montre avec une puissance peu commune le carcan social du Japon rural à cette époque, jusqu’à une fin stupéfiante dans son jusqu’auboutisme amoureux. Splendide. A ne pas manquer, dès le 4 août.
Sore ja, mata, et bonnes vacances cinéphiles !
Max Tessier
Gozu de Miike Takashi
14 juillet: Gozu (2003, 2h07), de Miike Takashi, avec Sone Hideki, Aikawa Shô
(Dist; Pretty Pictures).
21 juillet: Entre le ciel et l’enfer (1963, 2h23), de Kurosawa Akira, avec Mifune Toshirô, Nakadai Tatsuya. (Dist; Action).
4 août: La Femme de Seisaku (1965, 1h33), avec Wakao Ayako, Tamura Takahiro.
(Dist. Zootrope films).