Paru en 1999, le roman Stupeur et Tremblements avait déchaîné les foudres des médias nippons, vexés par cette description sans concessions de la hiérarchie d’entreprise japonaise. Pour son auteur, la Belge Amélie Nothomb, ce roman était avant tout une manière d’exorciser, dans une savante alliance d’autodérision et de critique des mœurs japonais, sa pénible expérience professionnelle dans un pays pourtant fantasmé depuis les soleils levants de son enfance. Réalisé en 2002, le film éponyme d’Alain Corneau revisitait le livre en alliant la préciosité émotive des variations Goldberg de Bach à la texture moderne d’une vidéo numérique haute définition. Sorti récemment, le DVD du film propose une ribambelle de bonus alléchants, dont un documentaire proposant les réflexions des acteurs et du public japonais autour de la projection du film au festival de Yokohama. Il ressort nettement de ce documentaire à cœur ouvert que ni les acteurs ni le public n’ont été choqués par le contexte heurté de cette histoire authentique. Une spectatrice japonaise affirme ainsi son contentement “d’avoir pu comprendre les différences culturelles entre la France et le Japon”. L’actrice Tsuji Kaori revient avec clairvoyance sur la dure condition des femmes à la fin des années 80 et sur “la règle du silence japonais”. Des témoignages à cœur ouvert qui en disent long sur l’auto-conscience plus qu’active des Japonais. Quant à l’”ogre” de l’histoire, le sous-directeur Omochi, il dévoile dans le DVD l’adorable visage d’un musicien de jazz très gourmand et opposé à la ségrégation professionnelle entre hommes et femmes. Le mot de la fin est pour le réalisateur Alain Corneau, ravi de l’aventure humaine du tournage, et encore très surpris de l’émotivité des acteurs japonais. Comme quoi nombre de clichés sont battus en brèche dans ce DVD essentiel à tout bon cinéphile nippophile… David Argomand |
Stupeur et Tremblements, Studio Canal |