Non, ce n’est ni une soucoupe volante ni le voisin du dessus qui fait une partie de pêche à la ligne depuis son balcon. C’est un fûrin, sorte de petite cloche en verre ou en métal prolongée d’une bande de papier cartonné qui se laisse bercer par le souffle du vent pour tinter d’un son léger, aigu et finalement très rafraîchissant: riin. Au cur de l’été japonais, la saison des pluies passée, le soleil tape fort. Une chaleur moite et suffocante où le vent ne fait que de rares apparitions, comme s’il se gardait pour les typhons à venir. Alors que certains (masos?) transpirent à grosses gouttes pour leur équipe de base-ball en jeu dans le tournoi annuel du Kôshien, alors que d’autres passent leurs journées sous des climatiseurs branchés à fond une petite laine sur le dos pour ne pas s’enrhumer, les fûrin, accrochés sous les fenêtres des maisons, font partie du décor estival et vous rappellent parfois que le vent souffle pour vous rafraîchir. Mais encore faut-il que celui-ci se manifeste, car parfois l’enchevêtrement des habitations l’empêche d’atteindre certains fûrin condamnés à jouer les épouvantails. L’espérance de vie des fûrin est généralement élevée, mais les typhons de la fin de l’été en ont déjà anéantis plusieurs, victimes du manque de prévenance de leur propriétaire. Mais ceux qui auront survécu aux rafales successives continueront parfois de tinter, l’automne venu, nous offrant un air de nostalgie: c’était chaud l’été, mais c’était bien. Pierre Ferragut |