Au-delà des clichés et des réalités, dont le traitement requiert une longue analyse, la France et le Japon sont en train d’initier une nouvelle voie commune dans leur rapprochement, précisément dans le domaine de la protection sociale. L’internationalisation du Japon, en cours sur le plan économique et financier, ne peut avoir de sens sans une dimension sociale. Fort logiquement, les employeurs et la fonction publique japonais ont initié un mouvement visant à la mise en place de conventions bilatérales de Sécurité Sociale (é–âÔï¤åØã¶íË shakai hoken kyôtei). L’élaboration de tels documents officiels, qui ont valeur de traité, représente l’aboutissement d’un long travail juridique, technique et de négociation au plus haut niveau, et n’entrent en vigueur qu’après ratification des Parlements respectifs et publication de décrets d’application. Le fait que l’Allemagne soit le premier pays européen concerné n’est pas le fait du hasard, mais le résultat d’un processus historique qui permet de placer le Japon, du point de vue de la protection sociale, dans la même catégorie que les pays d’Europe continentale, c’est-à-dire les pays bismarckiens, (dont la France fait également partie). La référence à la Prusse et au concept bismarckien d’Etat-Nation, qui a inspiré dans de nombreux domaines les réformes de l’Ere Meiji, est importante dans le domaine social : l’Etat est un acteur majeur de la protection sociale (contrairement aux pays anglo-saxons) et les systèmes de retraite sont financés principalement par la technique de la répartition (ïçâ¡ï&Mac251;éÆ fuka hôshiki). Ce terme signifie que les cotisants financent directement les prestations des bénéficiaires, les générations étant liées entre elles par un contrat implicite de solidarité. Ce système de financement est habituellement opposé à celui de la capitalisation (êœóßéÆ tsumitate shiki), c’est-à-dire l’accumulation de réserves. La France ne pouvait être ignorée quand le Japon souhaite internationaliser sa protection sociale, du fait du renforcement des investissements productifs réciproques, dont la partie la plus visible concerne le secteur automobile (opération Renault-Nissan et implantation d’une usine Toyota en France). Le processus franco-japonais est en effet désormais engagé, par une déclaration officielle des Premiers ministres japonais et français à la fin de l’année 1999, situant pour la première fois la protection sociale sur la liste des sujets de coopération mutuelle. Jean-François Estienne *, |
* J-François Estienne |