Cette année encore, le Japon, et l’Asie en général, seront présents en force sur la Croisette, avec pas moins de trois films japonais en sélection officielle, dont deux en compétition, ce qui ne s’était pas vu depuis 1983 (La Ballade de Narayama, Palme d’Or, et Furyo, de Oshima Nagisa). Justement, Oshima nous revient enfin après treize années d’absence, avec le premier film qu’il a enfin pu tourner depuis… Max, mon amour, une production française de 1986. Gohatto (Tabou) , de nouveau une co-production franco-nippone, pose un regard anti-conformiste sur le monde des samourai, et des Shinsengumi en particulier. Adapté de deux nouvelles de l’écrivain populaire Shiba Ryôtaro, Gohatto a pour “héros” un jeune samourai, Kano Sozaburo (joué par Matsuda Ryuhei), dont la beauté sème le trouble au sein du clan Shinsengumi vers 1865, déclenchant désirs et rivalités. Ce sujet “scandaleux” attirera forcément la curiosité, venant de l’auteur de L’Empire des Sens, bien que le film soit d’une facture toute classique, et finalement assez pudique, mais avec un casting prestigieux (Matsuda, Asano Tadanobu, Takeda Shinji pour les jeunes, flanqués de Kitano Takeshi et de Sai Yoichi pour les “vieux”! Face à ce jidai-geki “gay”, un outsider surprenant: le nouveau film d’Aoyama Shinji, Eureka, road-movie complexe qui déroule ses méandres pendant 3h37 ! Auteur de cinq films d’auteur revisitant les genres, comme Helpless, Chimpira, An Obsession, Aoyama est cette fois sur les traces du jeune Wenders et d’Angelopoulos, dans cette quête forte d’une renaissance familiale différente, autour d’un chauffeur de bus (Yakusho Koji) traumatisé par une prise d’otages, et qui ramène deux enfants à la vie. En scope noir et blanc (enfin, plutôt sépia), Eureka travaille sur le temps et l’espace, et on y reconnait aussi la patte d’un jeune producteur ambitieux, Sento Takenori (Suzaku, 2/Duo, M/other, etc). Par ailleurs, Un Certain Regard présentera le second film du jeune Takahashi Yoichiro, Un dimanche inachevé (Nichiyobi wa owaranai), après son remarqué Fishes in August (Hachigatsu no mizu no naka, 1998). Ce nouveau film est la chronique poético-sociale d’un jeune homme fasciné par les vélos et par une petite culotte rouge, et dont on ne sait pas trop bien pourquoi il va commettre un crime. C’est en tout cas la confirmation du talent d’un vrai cinéaste, parmi tant d’autres de cette jeune génération. Au dernier moment, nous apprenons la sélection d’un autre film japonais, cette fois à la Quinzaine des Réalisateurs. Il s’agit du troisième film du jeune Kobayashi Masahiro, Koroshi (Meurtre), dont le second, Bootleg film (La Route des petits voyous) avait été présenté, sans succès, à Un Certain Regard, l’an dernier. Enfin, hors-Cannes (mais aux mêmes dates !), signalons aux nippocinéphiles qui restent à Paris que la Maison de la Culture du Japon projettera les cinq parties de la superbe version de Miyamoto Musashi, du regretté Uchida Tomu. Cette adaptation des célèbres romans de Yoshikawa Eiji (La Pierre et le sabre et La Parfaite lumière), tournée entre 1961 et 1965, en scope-couleurs, pour la Toei, avec Nakamura Kinnosuke dans le rôle principal, est à notre avis la meilleure réalisée au Japon, en tout cas plus exhaustive que celle d’Inagaki Hiroshi, avec Mifune Toshiro, en trois parties, distribuée en France par Alive. Donc, à ne pas manquer. O-Tanoshimini ! Max Tessier
Gohatto (Tabou), de Oshima Nagisa (1h40), le 16 Mai. Sortie en France prévue le 17 mai. A PARIS Miyamoto Musashi, de Uchida Tomu (1961/1965, en cinq parties), du 9 au I3 mai ( trois passages pour chaque film) à la Maison de la Culture du Japon, 101 bis Quai Branly, 75O15 Paris. |
Miyamoto Musashi de Uchida Tomu |