HISTOIRE ET DIVERSITE
La préhistoire Période allant des origines jusqu’à 645 (début de Nara) elle correspond au développement interne de la musique autochtone en dehors de tout contact étranger. D’après les découvertes archéologiques ( ken, ocarina en terre cuite ou en pierre; haniwa, figurines mortuaires en terre cuite dont certaines représentent des personnages jouant du wagon, cithare à 5 cordes, de la flûte, du tambour ou encore en train de chanter et de danser), il ne fait aucun doute que la musique autochtone ait connu des formes instrumentales et vocales, de structure indéterminée (1) avec accompagnement d’un ou deux instruments et parfois de danse. C’était sans doute la même musique qui servait soit pour le culte des ancêtres et de la nature, le shintoïsme, soit pour les fêtes ou le divertissement.
La période antique Elle recouvre les deux époques de Nara (645-794) et de Heian (794-1185) et se caractérise par ‘introduction et l’assimilation de formes musicales du continent asiatique; comme le shômyô (chant liturgique bouddhique), le gagaku (musique instrumentale), le bugaku (danse accompagnée de gagaku). Ces formes se sont développées au Japon de telle manière qu’elles présentent des caractères spécifiques, et qu’elles n’ont pratiquement plus de points communs avec les formes dont elles sont issues.
La période médiévale
Elle s’étend de Kamakura (1185-1333) à Muromachi (1333-1573) et se caractérise par la naissance des formes véritablement japonaises telles que le heikyoku (récit et chant épique accompagnés de biwa, luth à 4 ou 5 cordes ) ou le nô (théâtre chanté, dialogué, mimé, et dansé avec accompagnement instrumental). A cette époque, le changement de régime politique va entraîner la résurgence de la musique indéterminée de la classe populaire. Les militaires, en s’emparant du pouvoir, ont discrédité tout ce que la classe noble avait valorisé, et encouragé la constitution de nouveaux genres musicaux issus du vieux fonds autochtone. A l’origine simple divertissement populaire, le nô s’est, au fil du temps, affiné pour devenir un spectacle élaboré, réservé à la classe dirigeante au XVIIe siècle. Le peuple des villes, privé de ses attractions, a alors créé de nouveaux genres musicaux et théâtraux en adoptant le shamisen, luth à 3 cordes, importé de Chine vers le milieu du XVIè siècle.
Haniwa : figurine en terre cuite datant du 7ème siècle avec un koto sur ses genoux.
Raigozu: peinture bouddhique du 12è siècle
Cette période couvre deux époques: Momoyama (1573-1603) et Edo (1603-1868), jusqu’à la restauration de Meiji (1868), et se caractérise surtout par l’essor de la musique citadine, telle que le bunraku (des marionnettes miment un récit accompagné du shamisen), le kabuki (théâtre dialogué, chanté, et dansé avec accompagnement orchestral) dans le domaine théâtral et, dans le domaine des solos instrumentaux, le shakuhachi (flûte de bambou en biseau à 5 trous), ou le koto (cithare à 13 cordes). On assiste également à cette époque, à la naissance de trio, sankyoku, avec koto, shamisen et shakuhachi et à des formes vocales accompagnées de shamisen, telles que le gidayû, le kiyomoto, l’ichû bushi, le tokiwazu, le naga-uta, qui s’intègrent dans les genres théâtraux. Quant au jiuta et ko-uta, également accompagnés de shamisen, ils gardent le caractère d’un solo vocal. Une autre forme vocale, le sekkyô bushi, (chant et récit de texte profane), en se détachant de son origine religieuse, a prospéré dans les grandes villes. Au XVIIe siècle, on voit apparaître un nouveau genre accompagné de biwa, luth à 4 ou 5 cordes: le satsuma biwa (récit et chant) au sud du Kyûshû, et un peu plus tard, le chikuzen biwa, au nord du Kyûshû, sous l’impulsion du heike biwa.
La période contemporaine
Elle va de la restauration de Meiji jusqu’à nos jours, et marque à nouveau un retour à la musique déterminée (1), mais cette fois influencée par la musique occidentale. Au contact de la musique classique occidentale, la musique japonaise traditionnelle prend donc un nouveau départ, en se libérant de l’écriture pentacordale et hétérophonique qui était son écriture depuis de trop longues années. La première génération de musiciens japonais de style occidental est trop mobilisée par l’acquisition d’une nouvelle technique pour pouvoir repenser les fondements de la musique traditionnelle.
Ce n’est qu’avec le temps, après la deuxième guerre mondiale, qu’ils parviennent à se détacher des modèles occidentaux et s’efforcent, en revenant aux sources musicales du Japon, de faire uvre créatrice dans un style occidental mis au service d’une sensibilité et d’une culture japonaises.
T.A
Ukiyo-e sur lequel figure une scène de Kabuki
(1) La musique déterminée est constituée par la fixité de ses éléments:
hauteur des notes fixée au diapason, valeurs rythmiques et temporelles fixées au moyen d’une unité temporelle arithmétique. La musique classique occidentale et le gagaku, le shômyô, et le koto sont les formes les plus représentatives de la musique déterminée. La musique indéterminée, elle, est fondée sur des éléments constitutifs musicaux moins rigoureux: la hauteur des notes est fixée par rapport à un repère, librement émise et susceptible de varier, tandis que le rythme et le tempo obéissent à une périodicité fluctuante. La musique du nô ou du shakuhachi et les chants narratifs (katarimono) appartiennent à cette seconde catégorie.
La musique indéterminée n’est donc pas une improvisation, mais simplement un mode de composition musicale qui fait appel à des matériaux sonores fluctuants.
Il serait erroné de prétendre, comme on le fait souvent, que la musique indéterminée constitue la forme primitive de la musique déterminée et qu’elle lui est inférieure.