Poursuivant inlassablement sa quête du Graal cinématographique japonais, Carlotta publie la seconde partie des œuvres de Yoshida Kijû, l’un des rares survivants de la Nouvelle vague nippone encore en activité. Cette nouvelle livraison, en sept films et cinq DVD, remet en lumière la difficile période post-Eros+Massacre (à l’exception de Adieu clarté d’été tourné en 1968), qui va des œuvres les plus radicalement expérimentales du cinéaste (Aveux, Théorie, Actrices, Purgatoire Eroica, Coup d’Etat) aux films de la maturité et de la renaissance cinématographique, après une longue période télévisuelle, et un projet mort-né au Mexique. Dans Purgatoire Eroica (1970, N&B), Yoshida, en pleine révolution du langage, va très loin dans la “déconstruction” et l’abstraction formelle (avec son opérateur Hasegawa Genkichi, le metteur en lumière d’Eros+Massacre) en vogue à l’époque, au risque de créer sa propre impasse esthétique. Avec Aveux, Théorie, Actrices (1971, couleurs), il (dé)consruit un puzzle difficilement déchiffrable, en hommage à trois stars du cinéma japonais : Asaoka Ruriko, Arima Ineko, et, bien sûr, Okada Mariko, son épouse. Il se reprend deux ans plus tard avec Coup d’Etat (1973, N&B), portrait incisif et fascinant du théoricien anarchiste (de droite) Kita Ikki (incarné par le prodigieux Mikuni Rentarô), qui fut l’un des instigateurs du coup d’Etat militaire manqué de février 1936.
Les trois derniers films sont ceux que Yoshida a pu tourner après treize ans passés à la télévision. Promesse (1986) est une admirable réflexion sur la vieillesse et la mort, à travers le couple Mikuni Rentarô-Murase Sachiko. Les Hauts de hurlevent (1988) est une transposition hyper-esthétisante du fameux roman d’Emily Brontë, avec l’impressionnant Matsuda Yûsaku. Enfin, dernier film de l’auteur à ce jour, Femmes en miroir (2003), co-production française, revient sur le traumatisme de Hiroshima à travers les destins croisés de trois femmes, sans aucune concession commerciale de la part de Yoshida.
Tous les fims sont accompagnés des bandes-annonces originales, et d’une préface de Yoshida en personne. Voilà donc qui complète brillamment la première série de DVD editée par Carlotta et l’hommage rendu au cinéaste en 2008, au Centre Pompidou.
Sore ja, mata,
Max Tessier
Cinq DVD en édition individuelle. 14,99€ l’unité.