L’histoire du cinéma japonais va-t-elle passer par le DVD ? Sans doute, puisque vont sortir de plus en plus de films inédits, non distribués dans les salles françaises, ce qui est un moyen de nous faire oublier les carences de la distribution classique. Ainsi, Columbia, qui a refusé de sortir en salles l’excellent Tokyo Godfathers, de Kon Satoshi (sans doute parce qu’il n’a pas eu le succès escompté aux Etats-Unis), l’a proposé (via Gaumont) en DVD au public français, depuis décembre dernier. Transposition urbaine moderne et sous forme d’animation, d’une histoire inspirée du film de John Ford, Three Godfathers (1948), le film de Kon Satoshi est un régal visuel et auditif, et permet d’appréhender un Tokyo plus réel, grâce aux recherches faites par le cinéaste et son équipe pendant des mois, notamment dans le quartier de Shinjuku. Le bonus permet d’ailleurs de voir comment Kon Satoshi et son directeur artistique, Ike Nobutaka, ont perçu ce Tokyo plus pauvre et réel que la mégapole futuriste que l’on connaît d’habitude. Le making of montre comment les animateurs et dessinateurs ont recréé les couches de neige, et les sacs poubelles transparents propres à Tokyo. Et l’histoire de ces trois SDF qui sauvent un bébé de la rue le soir de Noël, reste émouvante, tout en distillant un humour caustique assez réjouissant sur les aspects les moins reluisants de la société japonaise actuelle. A ne manquer sous aucun prétexte, après le merveilleux Millenium Actress (Sennen joyû) et Perfect Blue, du même talentueux réalisateur (1). De son côté, Wild Side continue d’exploiter les trésors des studios Daiei, et, après la série Zatôichi, propose aux nippo-cinéphiles fous de base, dans sa série des “Introuvables”, la Trilogie du Sabre, soit trois films du trop méconnu Misumi Kenji, avec l’incontournable Ichikawa Raizô, repris au Japon par Kadokawa Pictures. On y trouve Tuer ! (Kiru, 1962, d’après un roman de Shibata Renzaburô), sans doute le plus beau, où le cinéaste est au sommet de sa stylisation plastique. Comme le dit son chef-décorateur Naitô Akira, Misumi était un perfectionniste, et un maître du cadrage. Egalement inspiré du même écrivain, La Lame diabolique (Kenki, 1963) est un aussi un beau spécimen du genre, tandis que Le Sabre (Ken, 1964, le seul en noir & blanc), tiré d’un roman contemporain de Mishima Yukio est une fable moderne sur les conflits entre le kendo et l’amour…(pas de bonus dans cette édition). Si vous aimez les jidai-geki, c’est-à-dire les films en costume, et leur fascinante esthétique, cette trilogie est certainement un must pour votre DVDthèque. Maintenant que tous les journaux vendent un DVD le week-end, rappelons que le quotidien Le Monde a proposé en janvier le DVD des Sept samourais (Shichinin no samurai, 1954) dans sa version intégrale (193 minutes). Un classique à voir et à revoir, indispensable. Côté animation, à signaler aussi que sort chez Kaze la série-culte TV Great teacher onizuka (GTO) de Abe Noriyuki, d’après le manga érotique de Fujisawa Tôru, en trois DVD (épisodes 1 à 14), destiné à tous les fans de manga et d’anime. Nous reviendrons dans une prochaine chronique sur Séance, un des meilleurs films d’angoisse de Kurosawa Kiyoshi, publié chez Arte. Voilà de quoi meubler vos soirées d’hiver en attendant la prochaine vague de l’inépuisable océan DVD. Soreja, mata, Max Tessier |
Tokyo Godfathers, anime de Kon Satoshi chez Gaumont- Columbia, avec bonus. Great teacher onizuka (GTO), de Abe Noriyuki, chez Kaze. Episodes 1 a 14. La Trilogie du Sabre. Trois films de Misumi Kenji : Tuer !, La Lame diabolique et Le Sabre chez Wild Side. Sortie le 16 février. (1) Retrouvez un entretien exclusif avec Kon Satoshi sur le site Japonline.com : |
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