On connait les relations complexes entre Hou Hsiao Hsien, cinéaste taiwanais exigeant, et le Japon, qui a co-produit nombre de ses films. La compagnie Shôchiku, qui avait produit presque tous les films d’Ozu Yasujirô, a eu l’idée de lui commander un film à l’occasion du centième anniversaire de la naissance d’Ozu, ce réalisateur qu’on ne présente plus et qui est devenu une icône de la cinéphilie mondiale, après des décennies d’ignorance. En résulte ce beau film étrange, Café Lumière qui revient donc aux sources du cinéma. Tourné entièrement à Tokyo, il a récemment été présenté à la Mostra de Venise après avoir été refusé à Cannes…
Hou Hsiao Hsien, qui ne fait jamais dans la simplicité évidente, s’est posé de nombreuses questions avant le tournage, et notamment celle ci: “Dans mon observation de la vie japonaise, j’allais prendre un risque considérable, celui de passer à côté de la réalité. Or, je suis persuadé que la vérité du quotidien constitue la véritable base d’un film… Je craignais donc que ma perception du pays ne paraisse quelque peu superficielle”, explique-t-il en préambule. Le résultat est, comme souvent chez le cinéaste taiwanais, un film concret-abstrait, qui reprend plus ou moins un thème cher à Ozu (et à Noda, son scénariste), celui des relations enfants-parents, en la personne de Yôko (Yo Hitoto), une jeune Japonaise enceinte d’un ami taiwanais, qui se confie à sa belle mère, et non à son père. En fait, cette “histoire”, qui tient en deux pages, est un prétexte à de lentes déambulations dans une Tôkyô sillonnée par un système ferroviaire omniprésent, qui semble fasciner le cinéaste, à tel point que les plans de trains composent les trois quarts du film, dont le plan final tourné à Ochanomizu. En fait d’hommage à Ozu, c’est plutôt un hommage aux compagnies ferroviaires et autres tramways de la capitale japonaise. Au choix, on trouvera ce curieux hommage subtil et décalé, dans la veine marginale de Hou Hsiao Hsien, ou laborieux et étiré, à la limite de l’ennui (moins, toutefois que Millenium Mambo déjà tourné au Japon). Le cinéma de Hou Hsiao Hsien étant sans concession, on sait à quoi s’attendre, extatique ou non. A signaler aussi la sortie récente de l’émouvant Nobody knows (Dare mo shiranai), de Koreeda Hirokazu, un peu gâché par des longueurs excessives, surtout dans la première partie. Il a été récompensé par le prix d’interprétation masculine à Cannes attribué au jeune Yagira Yuya (un non professionnel). Notons aussi la sortie du visuellement splendide, mais narrativement confus Innocence (alias Ghost in the shell 2), de Oshii Mamoru, également présenté à Cannes, mais non primé. Une fois de plus, le cinéma japonais est “pluriel” et plus que varié. Soreja, mata, Max Tessier |
Café Lumière, de Hou Hsiao Hsien (1h49). Sortie le 8 décembre 2004. Nobody knows (Dare mo shiranai), de Koreeda Hirokazu (2h21). Sortie le 10 novembre. Innocence, animé de Oshii Mamoru (1h40). Sortie le 1er décembre. |
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