Dans le tsunami de films japonais édités en DVD, il faut trier. Trions donc. Parmi les sorties récentes (prenant la suite logique des sorties en salles), privilégions celles de HK Vidéo, en particulier les trois coffrets des films de Suzuki Seijun, période Nikkatsu : à tout seigneur, tout honneur ! Cette belle édition propose neuf films en tout, deux coffrets déjà disponibles. Volume 1: La jeunesse de la bête (Yajû no seishun, 1963), La Barrière de chair (Nikutai no mon, 1964), et le mythique film-culte La marque du tueur (Koroshi no rakuin, 1967), qui, comme chacun sait, précipita le renvoi du cinéaste par la Nikkatsu. Volume 2: Elégie de la bagarre (Kenka no erejî, 1966), Detective bureau 2-3 (Tantei jimusho 2-3/ Kutabare akutô domo, 1963), et le jubilatoire Le Vagabond de Tokyo (Tôkyô nagaremono, 1966), peut-être le chef d’œuvre de Suzuki. Le 3ème coffret (à paraître vers mai) proposera Les Fleurs et les vagues (Hana to dotô, 1964), Histoire d’une prostituée (Shumpu-den, 1965), et La Vie d’un tatoué (Irezumi ichidai, 1965), au grandiose finale. Une édition de qualité de films incontournables du cinéma pop japonais, comportant une présentation, un portrait et une interview de Suzuki (“Seijun” pour les fans, aujourd’hui âgé de 80 ans), des bande-annonces originales, et des bio-filmos, peut-être un peu trop limitées. Un must pour ceux qui ne connaitraient le cinéma japonais de genre que par les films du vilain petit copieur Tarantino… HK Vidéo propose par ailleurs l’intégrale cinéma de la très fameuse série Baby Cart (Kozure Ôkami), en deux coffrets de trois films chacun (en VOSTF uniquement), le volume un offrant Le Sabre de la Vengeance, L’enfant-massacre, et Dans la Terre de l’ombre, et le second, Le territoire des démons, L’Ame d’un père, le cœur d’un fils, et Le Paradis blanc de l’enfer. Cette série, qui était considérée comme sympto-matique du déclin du cinéma japonais à l’époque (années 1970), est devenue une série-culte aujourd’hui, grâce à la mise en scène extraordinairement inventive de Misumi Kenji (4 épisodes sur 6), et à l’expression graphique ultra-stylisée des scénarii de Koike Kazuo, d’après le célèbre manga. Rappelons que Ôgami Itto, le héros de la série, est interprété par Wakayama Tomisaburo, le frère du mythique Katsu Shintaro (Zatôichi), qui produisit la série pour la Toho. Un régal pour les amateurs, qui pourront se passer de Kill Bill… Pour sa part, Cheyenne Films (alias Gilles Sebbah, one-man company !), sort deux films on ne peut plus différents: d’un côté, l’un des remakes du célèbre Sugata Sanshiro (La Légende du Grand Judô, de Kurosawa Akira, 1943), qu’il produisit pour son élève Uchikawa Seiichirô (Toho, 1965, avec Kayama Yûzo et Mifune Toshirô, VOSTF), adaptant l’intégralité du scénario original, censuré en 1943. Deux DVD, l’un proposant le film (beau, mais un peu trop académique à mon goût) d’une durée totale de 2h33, et l’autre les bonus (voir plus loin). De l’autre côté, le film iconoclaste de “Beat” Kitano Takeshi, Getting Any ? (Minna yatteru ka, 1994, VOSTF), pochade satirique très inégale, désopilante par moments, consternante à d’autres (ou vice-versa), plus représentatif des shows-télés “hénaurmes” de Beat, que du “grand auteur” Kitano ! Très bons bonus. Comme c’est souvent le cas, la qualité des bonus est très inégale, selon les éditeurs, et les contributeurs (souvent anonymes). Si les suppléments des coffrets Suzuki sont intéressants et fiables, c’est qu’ils sont concoctés par David Martinez, collaborateur de HK, qui connaît son sujet. De même pour les coffrets Baby Cart, avec une présentation par David Martinez, la bande-annonce cinéma de chaque film, des bio-filmos assez complètes, et sans trop d’erreurs, de Wakayama (acteur), Koike Kazuo (scénariste), Misumi Kenji, Saito Buichi et Kuroda Yoshiyuki (réalisateurs), des galeries de photos, des chapitres, un lien internet, et bien sûr le “HK collection”. Les meilleurs bonus sont sans doute ceux des deux DVD édités par Cheyenne Films: bande annonce originale de Sugata Sanshirô, influences et références, brève interview de Kayama Yûzô, analyse des scènes de combat par Yves Cadot et Jean-Luc Rougé, découverte du film par Christophe Champclaux, brève interview de Wang Yu sur l’influence du film et de Mifune sur ses propres films. Pour Getting Any, on a droit à un entretien avec Kitano (assez drôle), le “décryptage du film” (les référents culturels), à des affiches et photos de tournage, et surtout aux bandes-annonces originales de dix films de Kitano. Un vrai travail de bonus, bravo ! D’autres films sont sortis chez Wild Side (3 films de Kurosawa Akira, Goyôkin, de H.Gosha, et Le Sabre du Mal, de Okamoto Kihachi). Nous y reviendrons très bientôt. A suivre dans notre prochain numéro. Sore ja mata ! |
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