Une aventure franco-japonaise de près de 5 ans, avec rebondissements, espoirs et frustrations vient de connaître le franchissement d’une étape importante par la signature, vendredi 25 février 2005 à Paris de la Convention Bilatérale franco-japonaise de Sécurité sociale. Le texte de cette convention, qui concerne tant l’assurance-santé que la retraite n’est pas encore publié, ce qui prouve peut-être à quel point la négociation fut ardue. Son application n’est non plus immédiate, car la prochaine étape pour ce texte, dont le niveau juridique est identique à celui de la Constitution, est la ratification par le Parlement de chacun des deux pays. L’entrée en application devrait donc s’effectuer en 2006.
Cette saga [voir OVNI n° 529 du 15 septembre 2003] remonte à l’augmentation importante des implantations industrielles réciproques entre l’Hexagone et l’Archipel, notamment dans l’industrie automobile à la toute fin du siècle dernier. Initiée à la demande des employeurs, cette Convention devrait permettre l’envoi de salariés d’un pays signataire vers l’autre en franchise de cotisations pour le risque santé. Pour l’assurance vieillesse, il devrait être possible de ne pas s’affilier au régime local pour une durée de séjour allant jusqu’à 5 ans. En matière de reconstitution de carrière franco-japonaise, il s’agirait, sous certaines conditions, de pouvoir ajouter les durées de cotisation successives dans les deux pays, et de bénéficier d’une prestation, dans l’un des deux pays, au prorata de la durée de cotisation dans le régime concerné.
Concrètement, que cela signifie-t-il pour ceux et celles qui ont un parcours de cotisation franco-japonais ? Actuellement, qui a cotisé 5 ans en France et 20 ans au Japon, n’a droit à aucune retraite au Japon et à une toute petite retraite en France. En ajoutant ces deux durées (totalisation), grâce à la Convention, on obtient 25 ans, soit le seuil pour demander une retraite au Japon. Quel est alors le montant de la pension japonaise ? (Rappelons que dans chacun des deux pays, pour la retraite maximale, il faut ou il faudra 40 ans de cotisation). Dans notre exemple, la condition japonaise des 25 ans est atteinte grâce à la Convention, mais la cotisation effective au Japon n’a été que de 20 ans. Or, dans aucun pays – sauf exception – on ne peut prétendre de périodes pour lesquelles on n’a pas cotisé. Donc la prestation due pour 25 ans est réduite pour tenir compte de la durée réelle de cotisation : on la multiplie, dans notre exemple, par 20/25 (proratisation). A noter qu’on ne peut alors plus demander une retraite en France, car la Convention a pour but de mettre en relation les régimes pour verser une prestation dans un seul pays.
Dans les grandes lignes, la Convention fonctionne de manière symétrique pour reconstituer une carrière devant les régimes français, en se prévalant de durées de cotisation au Japon.
Enfin, il se pourrait que cette Convention couvre aussi les accidents du travail (òJç–), ce qui est assez rare et qui n’est peut-être pas étranger aux difficultés de fin de parcours de la négociation.
Cette Convention est la sixième signée par le Japon (plus d’une centaine pour la France), qui a donc déjà conclu de tels accords, forts différents, avec respectivement l’Allemagne, le Royaume-Uni, les Etats-Unis d’Amérique, la Corée du Sud et la Belgique.
Jean-François Estienne
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