Forte du succès du Voyage de Chihiro (1 330 000 entrées en France) et de Princesse Mononoké, Gaumont Buena Vista (filiale de Disney) se décide à sortir un “vieux” film de Miyazaki Hayao, Le Château dans le ciel (Laputa, 1986). Les fans de l’empereur de l’animé nippon y retrouveront, outre sa légendaire maîtrise technique, la plupart des thèmes du cinéaste. A travers l’histoire exemplaire de Shiita, petite princesse détentrice d’un médaillon aux pouvoirs magiques, qui permet notamment la lévitation, et que convoitent le très méchant Muska et son armée, confrontés à la calamiteuse Dora, à la tête d’une bande de pirates de l’espace, Miyazaki invente déjà un univers imaginaire qui est sien, et en même temps un hommage à Lewis Carroll, bien avant Chihiro. Comme dans ce dernier film, somme de toute son œuvre à ce jour, Shiita découvre une cité fantasmagorique à l’architecture composite, mi-européenne, mi-inventée, et se lie d’amitié avec un jeune garçon, Pazu, qui l’aidera à sortir des griffes de l’ignoble Muska. Et l’étonnante Dora, aux yeux exorbités et aux couettes dressées en l’air, est vraiment l’ébauche à peine déguisée de la vieille Yubaba, patronne des bains publics du Voyage de Chihiro, c’est à dire un repoussoir sympathique. On pourra également cueillir ici et là des références aux futurs films de Miyazaki, dont Porco Rosso (1992), jusqu’au “message écologique” final de la ville-forêt qui s’envole, accompagnée par la musique du fidèle Joe Hisaishi. Même s’il comporte quelques longueurs, et s’il n’arrive pas à la perfection formelle de Chihiro, Le Château dans le ciel est, avec le fameux Nausicaa de la vallée du vent (Kaze no tani no Naushika, 1984, qui devrait sortir à la fin de l’année, après Kiki delivery service / Majo no takkyubin, 1989), le véritable coup d’envoi de l’œuvre personnelle de Miyazaki, où il atteint déjà l’équilibre savant entre film de divertissement grand public et préoccupations poétiques et écologiques, dans la lignée de Paul Grimault. Que vous soyez fan ou non de l’auteur, Le Château dans le ciel est une belle initiation à son univers ludique et baroque. En attendant la sortie d’autres films (dont Dark Water, de Nakata Hideo, le 26 février, et Une Adolescente, de Okuda Eiji, le 5 mars), signalons aux nippocinéphiles purs et durs la grande rétrospective d’une cinquantaine de films du nouveau cinéma japonais des années 1980/90, qui doit avoir lieu à la Maison de la Culture du Japon à Paris, en trois parties, du 28 janvier à fin avril, et sur laquelle nous reviendrons en détails. Sore ja, mata, Max Tessier |
LE CHATEAU DANS LE CIEL (TENKU NO SHIRO- RAPYUTA),de Miyazaki Hayao (1986), 2h04. Prod. : Takahata Isao pour Tokuma Shoten. Dist: Gaumont Buena Vista. Sortie le 15 janvier. PS. On ne manquera pas cette occasion pour se procurer le Hors Série N°3 d’ANIMELAND (spécial Studio Ghibli, H.Miyazaki et I.Takahata), l’incontournable revue qui défend inlassablement tous les aspects de l’animation, en particulier japonaise. |