Pendant des années, la Constitution a été un sujet tabou. Effleurer l’idée de l’amender ou de la reconsidérer relevait d’un crime des plus graves, et la façon dont vous en parliez permettait de vous cataloguer.
Le Japon vivait à l’heure de la guerre froide et les divisions idéologiques étaient particulièrement fortes.
Les partisans d’une modification constitutionnelle étaient taxés de “conservateurs patentés” par ceux qu’ils traitaient de “gauchistes” parce qu’attachés au texte promulgué en 1947 comme s’il s’agissait de leur dernière bouée. Dès lors, le débat sur la Constitution a été réduit au minimum, chacun évitant de s’attirer les foudres de son voisin.
Les enquêtes d’opinion sur le sujet illustraient d’ailleurs cette prudence.
A partir de 1993, les choses ont évolué, amenant le débat sur une éventuelle réforme constitutionnelle sur le devant de la scène. La volonté du Japon à jouer un rôle dans la communauté internationale a mis en lumière certains paradoxes de la Constitution, notamment sur les questions militaires. Conscients des ambiguïtés, les Japonais sont aujourd’hui 52 % à demander une réforme, un record depuis 1947. Pour certains comme le constitutionnaliste Higuchi Yôichi, “la Constitution japonaise a vécu 50 ans sans trop de difficultés. Toucher maintenant à l’un de ses articles, c’est ouvrir la boîte de Pandore. On verra alors apparaître tous les vieux démons, à commencer par la passion nationaliste”. Cette crainte entretenue par une partie de la presse japonaise ne semble donc plus impressionner la majorité de l’opinion publique.
C. L.